La poète Véronique Sylvain, une guide «pour explorer la beauté du Nord»

La 11, une route pour méditer

Dans chaque page de son premier recueil de poésie Premier quart, Véronique Sylvain nous fait voyager. Avec des images fortes et frappantes, inspirées par le Nord de l’Ontario, le recueil a été comparé à un «guide de voyage de prédilection pour explorer la beauté du Nord*».

Dans la ferme familiale où elle a grandi, à Kitigan (à quelques kilomètres de Kapuskasing), les chansonniers nourrissaient l’univers de Véronique Sylvain. À Sudbury, où elle a poursuivi des études en littérature, elle a découvert la poésie de Robert Dickson et de Michel Dallaire. En 2008, elle a atterri à Ottawa, et habite maintenant dans le quartier Vanier. Cependant, les paysages et le ciel du Nord continuent de l’habiter, et c’est ce qu’on retrouve dans Premier quart.

Premier quart cumule les prix : en 2020, il a reçu le Prix de poésie Trillium en langue française et le Prix du livre d’Ottawa de création littéraire en français qui souligne dans «l’incroyable talent des auteurs». En 2021, s’ajoutait le Prix Champlain d’excellence littéraire franco-canadienne, catégorie adulte.

La critique des jurys est élogieuse : «Premier quart est un poème-fleuve calme et paisible qui frenche le froid du nord de l’Ontario», a écrit le jury du Prix du livre d’Ottawa. Pour le jury du Prix Champlain, Premier Quart permet de «redécouvrir le Nord» de l’Ontario : la poésie de Véronique Sylvain «s’installe, à chaque nouvelle page, comme la fine neige qui tombe, dans chaque recoin de votre tête», dit-il.

NorddelOntario.ca a demandé à la poète de lui livrer un petit guide de voyage, cette fois-ci en prose.

Véronique Sylvain, autoportrait, à Kitigan. 

Quelles images vous viennent lorsque vous pensez au nord de l’Ontario?

Comme j’ai vécu plusieurs années dans le Nord-Est et le Moyen-Nord ontariens, spontanément, je pense aux villes et aux villages qui sillonnent la 11, la 17 et la 144, routes qui font partie de mon imaginaire et que j’ai souvent empruntées.

Aujourd’hui, lorsque je remonte vers le Nord, je reprends ces routes avec une certaine nostalgie. Le Nord ontarien, c’est aussi, pour moi, les grands espaces et paysages (leur tendresse, étendue et rudesse), avec les forêts (épinettes, pins, bouleaux), le chemin de fer sur lequel on voit passer à l’occasion des trains de marchandises.

Le Nord, c’est également pour moi une bouffée d’air frais, la liberté, un endroit pour penser et profiter du plein air (par exemple, dans le bois, sur un lac, une rivière) et pour passer du temps avec ma famille et des amis.

À la pêche, aux poèmes ou au poisson, au lac Rémi de Moonbeam. Photo : Véronique Sylvain.

Ces images nourrissent votre poésie? Qu’est-ce qui vous inspire?

Pour l’écriture de mon premier recueil de poésie, Premier quart (Prise de parole, 2019), je me suis surtout inspirée des émotions et des souvenirs que ces images suscitent chez moi. De plus, des œuvres d’auteurs et d’autrices de l’Ontario français ayant écrit sur le Nord et que j’ai découvertes au fil du temps ont sûrement eu une influence sur ma façon d’écrire et de peindre le Nord.

Le ciel de Sudbury, avec le Super Stack et l’édifice Parker de l’Université Laurentienne. Photo : Véronique Sylvain.

Dans mon recueil, je dresse un parallèle entre le nord de l’Ontario et le Bas-Saint-Laurent, régions liées à l’histoire de ma famille et où j’ai habité un certain temps. Ces régions, leurs villages et petites villes, l’immensité de leurs paysages, ainsi que la proximité des gens à la nature ont nourri certaines sections de mon recueil.

Sinon, de façon générale, je m’inspire de tout et de rien pour écrire (par exemple de la quotidienneté, de l’amour, de l’enfance). Toutefois, pour me ressourcer, prendre du recul et mieux créer, la nature, que je sois dans le nord de l’Ontario ou ailleurs, m’est inestimable.

Y a-t-il un endroit dans le Nord où vous aimez particulièrement écrire, où l’inspiration vient facilement?

J’écris surtout lorsque je suis de retour du Nord, par exemple, chez moi, à Ottawa. J’ai plus de temps pour passer en boucle des photos que j’ai prises lors de mon séjour. Les bribes de textes que je note dans mon iPhone m’aident plus tard à pondre quelques poèmes. Je n’ai donc pas de lieux précis où j’écris et où l’inspiration me vient facilement, puisque je me laisse souvent porter par les moments, les émotions, je m’en imprègne pour enfin tenter de les mettre sur papier. Je suis toujours contente d’avoir pris plusieurs photos et pris quelques notes au passage, quand je cherche l’inspiration.

Le ciel de Kitigan. On imagine la poète à la fenêtre de la maison familiale. Photo : Véronique Sylvain.

Parlez-nous de la route entre Ottawa, où vous habitez, et Kapuskasing, où est votre famille.

Malheureusement, depuis la pandémie, je ne suis pas montée très souvent dans le Nord et n’ai donc pas emprunté les routes qui relient Ottawa à Kapuskasing. En temps normal, il m’arrive de monter avec des amis, de la famille ou seule, en auto, et de conduire pendant de nombreuses heures. On dirait que ce voyage est un genre de rituel pour moi, une étape avant d’arriver physiquement et mentalement dans le Nord.

La première fois que j’ai pris l’avion d’Ottawa pour me rendre à Timmins, à deux heures de Kapuskasing, comme je n’avais pas fait la route, je n’avais pas tout à fait l’impression d’être arrivée dans le Nord. Le voyage en avion était moins long et méditatif que celui dans une auto, à conduire pendant plusieurs heures.

Il y a des endroits où vous aimez vous arrêter, en route?

J’aime bien m’arrêter à Mattawa, plus précisément au Valois, pour manger et profiter du paysage et contempler la rivière des Outaouais. Si je suis à Sudbury, je m’arrête toujours pour admirer le lac Ramsey, au parc Bell.

Sur les rives du lac Ramsey, à Sudbury. Photo : Véronique Sylvain.

Si je pense au Nord-Ouest ontarien, coin que j’ai moins visité et où ma sœur cadette a habité pendant quelques années, j’aimerais bien un jour aller voir le Géant endormi, au bord du lac Supérieur.

Mon élément étant l’eau, je me sens naturellement attirée par de nombreux cours d’eau dans le Nord.

Pebble Beach, sur les rives du lac Supérieur. Photo : Véronique Sylvain.

Quelles sont vos adresses coups de cœur?

D’autres incontournables lors d’un voyage dans le Nord-Est ontarien : manger de la crème molle du Dépanneur Meilleur (autrefois Dépanneur Jackie’s) à Moonbeam, acheter du délicieux fromage de la Fromagerie Kapuskoise, puis, lorsque la saison le permet, faire un tour au Marché des fermiers de Kapuskasing.

Les carottes et les oignons de la ferme Sylvain.

Outre PREMIER QUART, QUELLE POÉSIE DÉCRIT BIEN LE NORD, À VOS YEUX?

Si on s’en tient à la poésie franco-ontarienne, je pense à l’œuvre de Patrice Desbiens, né à Timmins. La poésie de Desbiens reste largement imprégnée par le Nord (urbain ou rural). Des recueils incontournables : Un pépin de pomme sur un poêle à bois (Prise de parole, 1995), décalage (Prise de parole, 2008), Sudbury (poèmes 1979-1985) (3e édition) (Prise de parole, 2013), pour ne nommer que ceux-ci.

Le recueil L’espace éclaté (Prise de parole, 1988) de Pierre Albert nous plonge à son tour dans le Nord ontarien, notamment dans les régions de Thunder Bay, de Kapuskasing et de Fauquier et de Sudbury.

Le Nord ontarien a également inspiré plusieurs poèmes de Robert Dickson (par exemple, ses recueils Grand ciel bleu par ici, Humains paysages en temps de paix relative, publiés chez Prise de parole respectivement en 1997 et en 2002). Dickson a d’ailleurs signé des textes de chansons pour le groupe CANO, dont la mythique Au nord de notre vie (1977), ode aux Franco-Ontariens du Nord.

Pour une poésie plus récente et écrite par une autrice de la relève, il y a le premier recueil de Sonia-Sophie Courdeau (Sonia Lamontagne), À tire d’ailes (Prise de parole, 2011), dont un bon nombre de textes poétisent Fauquier, Blind River et Sudbury.

Je pourrais citer plusieurs autres poètes franco-ontariens dont l’œuvre décrit bien le Nord, mais en voici quelques bons exemples.

À lire :

Premier quart
Éditions Prise de parole, 2019

*La citation sur le guide de voyage pour explorer la beauté du Nord est tirée d’un texte de Mylène Viens paru dans Medium.com/laRecrue à la sortie du recueil.

À propos de Andréanne Joly

Andréanne Joly aime explorer, fouiller et faire découvrir la francophonie de l'Ontario et ses espaces touristiques. Elle le fait depuis 20 ans et le ferait encore 100 ans! Par leur richesse, leur beauté et leur diversité, les destinations ontariennes ne cessent de l'épater.

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